La religion et l’impact des moines

Le bouddhisme Theravada

 

_DSC0877L’Asie du Sud-Est est l’une des régions les plus hétérogènes concernant la religion avec la présence de bouddhistes, de chrétiens, de musulmans, d’hindoues, etc. En Birmanie, 89% de la population est bouddhiste. Les chrétiens et les musulmans représentent chacun 5% de la population et se divisent principalement dans différentes minorités ethniques[1].

Le bouddhisme Theravada est la forme dominante du bouddhisme en Birmanie. Dans celui-ci, Bouddha se manifeste dans la sphère sociale sous forme d’un père. Il est comme une transmutation du pouvoir et de l’autorité. Les valeurs enseignées par Bouddha sont  l’amour, la compassion, la non-violence et la tolérance. Toutefois, la violation des droits de l’homme donne une permission de vengeance favorisant une déshumanisation du peuple[2]. Pendant la junte militaire, le dirigeant Ne Win et, par la suite, le Général Than Shwe se sont servis du bouddhisme pour donner plus de légitimité à leur pouvoir[3]. Comme Bouddha, ils possédaient le rôle de dirigeant. Ainsi, des principes comme la non-violence, la non-opposition doivent être adhéré par le peuple afin de rendre honneur et de respecter ce dernier[4]. Le dirigeant est donc supposé de gouverner avec une certaine compassion. De son côté, le peuple doit rester calme face aux adversités et aux injustices. Le bouddhisme Theravada a donc beaucoup influencé la Birmanie (du moins pendant la dictature). Tant sur le plan politique que sur le plan social, cette religion a accordé un rôle particulier aux moines qui est non négligeable[5].

 

 La religion et le rôle des moines

 

Depuis la dynastie de Konbaung  (dernière monarchie sur le territoire avant l’arrivée des Britanniques), le bouddhisme et, en l’occurrence, les moines ont servi à mobiliser les masses populaires afin de dénoncer l’abolition de la monarchie par l’Empire colonial britannique. À la fin de la période coloniale, les moines ont réussi à unifier la population en créant uneEn-Birmanie-des-moines-demandent-l-expulsion-des-musulmans-Rohingyas_article_popin vague anti-colonialiste/nationaliste et sont considérés comme les pionniers de la nation Birmane[6]. Pendant la période d’ U Nu (1948-62), le bouddhisme est proclamé comme la religion officielle du pays. Ainsi,  moines bouddhistes et monastères reçoivent de nombreuses subventions de la part de ce gouvernement[7] , ce qui renforce la légitimité des moines et de la religion en général. Cependant, lors de la prise de pouvoir du Général Ne Win en 1962 jusqu’à la fin de la dictature en 2011, leur influence au sein de la société a été contrôlée par la junte militaire, plus précisément par le Ministère de la Religion. Dès lors, les moines ont joué le rôle de porte-parole du peuple et ont représenté une forte opposition politique[8]. En effet, ils sont souvent à l’origine des revendications non-violentes faites contre le gouvernement Birman comme ce fut le cas en 1988 ou lors de la Révolution Safran en 2007. Se plaignant de l’état de l’économie birmane, ce mouvement pacifiste à l’origine a dégénéré lorsque des miliciens de la junte ont  fait l’usage de la force contre les moines bouddhistes[9]. Suscitant une indignation populaire, comment les moines parviennent-ils à avoir un tel soutien au sein de la société ?

En effet, les moines soutiennent la population sur le plan moral. Beaucoup de personnes décident d’aller  les voir pour obtenir des conseils dans différents sujets de la vie quotidienne. Les monastères  sont tout aussi importants. En effet, ce sont des institutions cruciales qui instruisent la population[10]. Ainsi, pour les personnes n’ayant pas accès à l’éducation publique, les monastères prennent en charge gratuitement de nombreux élèves et leur garantissent un certain niveau d’éducation, en leur apprenant notamment à lire et à écrire. Suivant une logique démocratique, où il n’y a pas de différences entre les élèves appartenant aux élites locales ou aux classes inférieures, les moines et les monastères représentent une opportunité afin d’accéder à une scolarisation.

De plus, l’étroite relation entre la religion et la population a permis aux moines de représenter une forte opposition contre la junte militaire. Ils symbolisent l’ordre social surtout lorsque les pressions économiques et les droits de l’homme ne sont plus respectés et deviennent insupportables pour la population[11]. Les moines sont donc considérés comme les « gardiens du peuple » car ils ont été à l’origine de plusieurs soulèvements populaires[12]. L’État va donc dépendre du bouddhisme en général et des moines afin d’atteindre la légitimité. Par ailleurs, de son caractère démocratique, le pouvoir monastique joue un rôle indispensable non seulement sur le domaine de l’éducation, mais aussi sur le plan social. Avec une Birmanie plongée dans une transition démocratique, les monastères semblent jouer un rôle important au sein de la société[13].

 


 [1] Syed Mohammed Ad’ha Aljunied, 2004. “Politics and Religion in contemporary Burma: Buddhist Monks as opposition”, Nanyang Technological University.

[2] Swearer, Donald, 2010. “The Bouddhist World of South East Asia”, State University of New York Press.

[3] Kerstin, Duell. 200 4. “Buddha’s Footprint in Burma”.  Goethe Institute Bangkok.

[4] Swearer, Donald. 2010 “The Bouddhist World of South East Asia”, State University of New York Press.

[5] Syed Mohammed Ad’ha Aljunied, 2004. “Politics and Religion in contemporary Burma: Buddhist Monks as opposition”, Nanyang Technological University

[6] Kerstin Duell, 2004. “Buddha’s Footprint in Burma”. Goethe Institute Bangkok.

[7]  Swearer, Donald. 2010 “The Bouddhist World of South East Asia”, State University of New York Press.

[8]   Kyaw Yin Hlaing, 2004 “Burma: Civil Society Skirting Regime Rules” dans “Civil Society and Political Change in Asia: Expanding and Contracting Democratic Space”. Stanford University Press, 406.

[9] Hallgren, Emily  2007 “Burma: A History of Repression and Resistance” Manchester College Peace Studies.

[10] Syed Mohammed Ad’ha Aljunied, 2004 “Politics and Religion in contemporary Burma: Buddhist Monks as opposition”, Nanyang Technological University.

[11] Kyaw Yin Hlaing, 2004 “Burma: Civil Society Skirting Regime Rules” dans “Civil Society and Political Change in Asia: Expanding and Contracting Democratic Space”. Stanford University Press, 406.

[12] Hallgren, Emily  2007 “Burma: A History of Repression and Resistance,” Manchester College Peace Studies

[13] Syed Mohammed Ad’ha Aljunied, 2004 «Politics and Religion in contemporary Burma: Buddhist Monks as opposition”, Nanyang Technological University.

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