La démocratisation

 

La junte militaire qui était au pouvoir depuis 1962 guidait la Birmanie peu à peu vers des processus de démocratisation. Les élections de 2010 furent les premiers pas vers une démilitarisation de l’appareil politique en passant d’un régime à parti unique militaire vers une semi-démocratie permettant les élites politiques de fraterniser avec les militaires. [1]

L’arrivée au pouvoir du nouveau président Thein Sein en 2011 fut encourageante pour la communauté internationale. Il annonca effectivement des réformes visant à mener la Birmanie vers une démocratisation. Parmi ces réformes, on peut compter une diminution de la censure des médias, un coupure dans le budget militaire, une augmentation du budget pour l’éducation et la santé, la libération de plusieurs prisonniers politiques, etc. [2] Dans ces réformes, Thein Sein manifestait l’intérêt de vouloir s’éloigner de l’ancien régime socialiste xénophobe et se rapprocher des minorités ethniques qui furent longtemps laissées-pour-compte. [3] Malgré ces réformes annoncées, le gouvernement continuait toujours la promotion de l’unité et de l’intégrité de la nation. [4] En 2011, le gouvernement soutena que la priorité du gouvernement était le développement économique et politique. Bien entendu, la sécurité nationale demeurait toujours dans la liste des priorités. [5]

Par contre, le Birmanie devait faire face à une période de démilitarisation et  devait permettre aux civils l’accès aux structures du pouvoir pour avancer sa démocratisation. [6] Dès 2011, Thein Sein déclara le retour d’élections multipartites, à saveur de « démocratie guidée ».[7] Il voulait avant tout se maintenir au pouvoir et créer une certaine légitimité grâce à l’organisation d’élections [8]

Aung Sann Suu Kyi et Thein Sein
Aung Sann Suu Kyi et Thein Sein

Puis, en 2012, les élections permirent l’entrée de partis politiques autrefois illégaux et des réformes constitutionnelles sur les élections. Les militaires conservaient cependant un nombre de sièges qui leur étaient réservés.

[9] Il était évident que le système électoral ne favorisait en aucun cas les petits partis et les minorités ethniques. De plus, il arrivait que, fréquemment, plusieurs partis étaient exclus des élections parce qu’ils étaient considérés trop instables. [10] Alors qu’en 2010, l’opposant du régime, la Ligue nationale pour la démocratie, avait refusé les élections et la Constitution, la LND entama une campagne pour participer aux élections de 2012. [11] Ainsi, le parti décida de s’enregistrer pour les élections et Aung San Suu kyi se présenta dans une région. En janvier 2012, après que le gouvernement eut procédé à des changements officiels sur la loi à propos des élections, Aung San Suu kyi fut autorisée à se présenter aux élections et gagna les élections en tant que membre du gouvernement (député).[12]

Les élections de 2015 annonçaient des réformes intéressantes afin de permettre, entre autres, l’accession d’Aung San Suu Kyi au poste de présidence, figure démocratique du pays. Récemment, la junte avait annoncé l’impossibilité de réformer la Constitution à temps pour les élections de 2015. [13] Le rejet total de la part du gouvernement ne permettait pas qu’Aung San se présente comme candidate à la présidence, car son mari et ses enfants étaient étrangers.

Seulement, le 13 novembre 2015, le parti d’Aung San Suu Kyi remporta les élections avec une majorité absolue. Bien entendu, Aung San Suu Kyi n’a pas pu accéder au poste de la présidence. Elle est seulement la secrétaire du parti. La victoire du parti était attendue. 25 ans plus tôt, la junte militaire birmane avait refusé de reconnaître la victoire écrasante de la LND. Le gouvernement autoritaire de Thein Sein avait été félicité par le Président américain Barack Obama pour avoir tenu des élections pluralistes. [14

En dépit de la démocratisation de l’appareil politique et de ses instances, il reste tout de même de nombreux problèmes que le nouveau gouvernement  élu démocratiquement doit faire face à présent. En effet, le nombre de prisonniers politiques reste élevé, l’existence de lois répressives en vigueur depuis l’ancien gouvernement de Thein Sein  qui limite la dissidence pacifique et les discriminations à l’encontre des musulmans de l’ethnie Rohingya   qui persistent et se multiplient.  [15

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Reportage: La démocratie gagne

https://www.youtube.com/watch?v=6c8dz-wwMrc

 

[1] Hunter Marston, «Myanmar’s Electoral System: Reviewing the 2010 and 2012 Elections and Looking Ahead to the 2015 General Elections», Asian Journal of Political Science 21.3 (2013), 269.

[2] Robert H. Taylor, « Myanmar: from army rule to constitutional rule? », Asian Affairs 43.2(2010), 222

[3] Ibid., 226.

[4] Ibid., 227.

[5] Robert H. Taylor, « Myanmar: from army rule to constitutional rule? », Asian Affairs 43.2(2010), 229.

[6] Renaud Egreteau, « Birmanie?: la transition octroyée », Études 416 (2012), 300

[7] Adam P. MacDonald. «From Military Rule to Electoral Authoritarianism: The Reconfiguration of Power in Myanmar and its Future», Asian Affairs 40.1 (2013), 21.

[8] Ibid.,, 21

[9] Hunter Marston, «Myanmar’s Electoral System: Reviewing the 2010 and 2012 Elections and Looking Ahead to the 2015 General Elections», Asian Journal of Political Science 21.3 (2013), 269

[10] Hunter Marston, «Myanmar’s Electoral System: Reviewing the 2010 and 2012 Elections and Looking Ahead to the 2015 General Elections», Asian Journal of Political Science 21.3 (2013), 272.

[11] Robert H. Taylor, « Myanmar: from army rule to constitutional rule? », Asian Affairs 43.2(2010), 228

[12] Kyaw Yin Hlaing. « Understanding Recent Political Changes in Myanmar ». Contemporary Southeast Asia 34.2 (2012),207.

[13] Kyaw Phyo Tha, Kyaw « 6-Party Talks Impasse Creates Rift Between Parliament and President, Army», The Irrawaddy, 3 décembre 2014. En ligne http://www.irrawaddy.org/burma/6-party-talks-impasse-creates-rift-parliament-president-army.html (page consultée le 8 décembre 2014).

[14]  La Tribune «  Birmanie : le parti d’Aung San Suu Kyi gagne les élections », 13 novembre 2015. En ligne   http://www.latribune.fr/economie/international/birmanie-le-parti-d-aung-san-suu-kyi-gagne-les-elections-521957.html    ( page consultée le 29 mai 2017).

[15Human Rights Watch « Birmanie : Les élections ont ouvert la voie à une amélioration de la situation des droits humains », 27 janvier 2016. En ligne https://www.hrw.org/fr/news/2016/01/27/birmanie-les-elections-ont-ouvert-la-voie-une-amelioration-de-la-situation-des  (page consultée le 29 mais 2017).

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